Mylène Farmer - Avant que l'ombre... Plaidoyer

Il y a deux ans déjà (ou seulement, c’est selon), Mylène Farmer revenait avec son dernier opus studio (après six ans) qui déclencha nombre de réactions… Pas très positives… Et pourtant…

MYLENE FARMER – Avant que l’ombre… (Plaidoyer)

On reproche à la chanteuse de toujours ressortir la même chose, les mêmes sons, les mêmes textes tortueux, très référencés, en partie compréhensibles après moult recherches sur le moindre petit mot ou en étant à l’affût de la moindre petite sonorité qui viendrait se glisser dans la chanson pour mieux la comprendre… C’est en partie ce qui fait sa différence et qui en fait une chanteuse à part (bien que les critiques ne le reconnaissent pas toujours). Alors forcément, on a un peu l’impression d’être perdus avec Avant que l’ombre… Beaucoup moins référencé (mais en cherchant bien, il y en a qui en ont trouvé et pas que dans la chanson Dans Les Rues de Londres), textes plus limpides (un chouia, si, si) et une musique plus dépouillée, loin des nappes technoïsantes, parfois alourdissantes, d’un Innamoremento par exemple. Mylène est donc revenue un peu différente mais un peu la même… Et voilà que les fans crient au scandale avec ce changement… Il faudrait savoir. Les inédits de l’album best-of Les Mots étaient décriés pour leur manque d’originalité et ici, trop différent. Notamment au niveau d’une chose, Mylène se montre beaucoup moins mystérieuse (voire mystique, seuls Avant que l’ombre…, Ange, parle-moi et éventuellement Redonne-moi sont dans cette veine, un peu étrange quand on voit l’enrobage très « croix » de l’album) mais surtout moins sombre et un peu plus joyeuse/heureuse. C’est peut-être ce qui a déconcerté. Elle la reine du gothique, là voilà un peu plus lumineuse (mais sans le côté bouddhisme d’Anamorphosée), n’hésitant pas à révéler un peu autre chose.

Et cette autre chose passe par des textes moins alambiqués et affrontant les choses de manières plus directes, voire plus crues. Là où dans Pas de Doute elle abordait l’éjaculation précoce sous forme de métaphore, elle parle de l’amour charnel qui se doit d’être inventif si on ne veut pas que la routine tue le couple de manière bien plus limpide dans L'amour n'est rien. Elle ose les « grossièretés » de langage là où elle était pleine de poésie avant (QI qui aligne quelques « culs » contre l’évocation en finesse de la sodomie dans Pourvu qu’elles soient douces). Qui a dit que Mylène ne savait pas évoluer ou qu’elle faisait la même chose ? On pourrait alors trouver le procédé facile, y voir une perte de qualité dans l’écriture. Que nenni, que ce soit dans Porno Graphique, QI ou l’Amour N’est Rien, le style est là, moins complexe mais toujours aussi maîtrisé. Trop simple peut-être ? Oui, on pourrait presque se le dire avec Aime qui rappelle pourtant Gainsbourg (notamment « sous réflex, je pose à nue… Je suis surex… Rien ne m’ex… ») qui est très alizéen, et qui ne cache pas un texte sombre sous une musique guillerette (comme Désenchantée ou C’est Une Belle Journée à laquelle ça peut faire penser). C'est simplement une chanson plus portée sur un amour heureux que malheureux... Mais la magie de l'écriture est là, associée à une musique addictive de Boutonnat. Cette chanson Aime est aussi symptômatique d’une musique plus dépouillée, même quand on s’aventure dans les rythmes rapides (une chose plutôt rare dans cet album), ça reste loin d’être trop saturés en sons électriques, même pour Peut-Etre Toi...

Cet album est donc loin d’être dépourvu d’intérêt, si Mylène est moins sombre, plus joyeuse, amoureuse même, elle traîne toujours sa « melancholia » au fil des chansons, comme dans les très belles Derrière Les Fenêtres (plutôt poétique) ou Tous Ces Combats, ce qui n’aurait pourtant pas dû la déconnecter de tout son public… Mais d’ailleurs, malgré la « révolte » de certains fans qui se sont faits entendre, si on regarde les ventes, au vu du marché actuel, elles ne sont pas si catastrophiques que ça. Beaucoup de ventes par téléchargement et pas mal en produits réels. Là où les Obispo, Pagny et autres Ségara, tout aussi vendeurs, ont tout autant (voire plus) de mal avec leurs nouveaux albums… On peut d'ailleurs aussi accuser le manque de promotion (une télé, une interview et peu de diffusion radio des chansons) autant que le choix, parfois douteux des singles mis en avant (j'aime bien Fuck Them All mais c'est pas le meilleur morceau de l'album, ni le plus accrocheur. Aime, dont le nom a circulé à l'époque, était peut-être plus basique, moins provocateur d'une fausse provoc' mais aurait pu remporter une adhésion un peu plus grande et Redonne-moi semble surtout une chanson mise en avant par Mylène mais pas dans l'espoir de relancer les ventes, mais plus par plaisir...).

Au final, qu'est-ce qui déplaît tant dans cet album ? Le son trop dépouillé (oui, mais c'est nouveau et ça donne quelque chose de tout aussi joli, parfois aériens comme sur J'attends ou Dans les rues de Londres, deux réussites de l'album) ? Les textes moins alambiqués (faudrait savoir ce que vous voulez, en plus ils ne sont pas mauvais pour autant, abordant de nouvelles choses ou sous un autre angle. Par exemple, on sent une certaine envie, pas forcément de révolte, mais d'affirmer certaines choses comme dans Fuck Them All ou Porno Graphique où Mylène scande dans le final "Plus l'esprit est libre, est libre, est libre", une chose qu'elle semble avoir appliqué à la stratégie commerciale de cet album) ? Le manque d'innovation (ah bah nan, je viens de vous faire voir que justement, elle a changé la forme, faut pas pousser mémé dans les orties) ? Le côté mystique en moins (bon, okay, il est peu présent, mais offre le majestueux Avant que l'ombre... qui ouvre l'album ou le très moyen Ange, parle-moi) ? Je donne ma langue au chat... Et après deux ans à l'écouter (ben si, vous avez sûrement fait comme moi, en boucle, hein) je suis sûr que vous ne le trouvez pas si mauvais (allez, ne serait-ce que pour le ghost track Nobody Knows idéalement mis en avant dans le concert de 2006). Donc, il ne reste que le livret. Je ne vois plus que ça. Oui, bon, faut avouer qu'il n'a ni le sens esthétique d'Anamorphosée ni l'originalité du livret voyage d'Innamoramento. Les photos sont sympathiques, mais le désordre des paroles, certaines impressions sur les photos et le côté oppaque des crédits n'en font pas le meilleur de la chanteuse...

Et une prochaine fois on reparlera peut-être des clips de cette période...

Comments

[Sailortoshyo]

Je suis assez d'accord avec cet avis, bravo :)

[desen38]

Kikou!

Bien sympa ton blog! Viens vivre ta passion pour Mylene sur

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A très bientôt!